La route continue et file vite, que ce soit sur le pouce, à pieds ou en KGB, petit clin d'oeil pour notre cher Nono! (comprenez Kitchen-Garden-Bedroom, le van).
N'allez pas croire que c'est de tout repos ce genre de vie, cela demande beaucoup d'organisation car le calendrier n'est pas extensible, de plan A (qui souvent tombe à l'eau très vite), de plan B
et C (qui ne marchent souvent pas mieux) et beaucoup d'impro au cas où ça marche pas... Et parfois attendre toute une journée coincé dans notre maison mobile, parce qu'il pleut "des chats et des
chiens" dehors (allez savoir pourquoi les anglais disent ça?) et que l'inondation est imminente, c'est pas la panacée. Mais pour obtenir ces purs moments de bonheur devant un coucher de soleil
sur la mer, une vue imprenable depuis un sommet qu'on vient de gravir en suant toute l'eau de son corps, ou encore devant un homard tout frais qu'on savoure en s'en mettant partout ... il faut ce
qu'il faut! Allez juste pour vous faire saliver...
le repas 5 étoiles des voyageurs...
Au détour de nos pérégrinations, nous nous sommes retrouvés en Nouvelle-Ecosse, une des provinces de l'est du Canada, pour de magnifiques randonnées du parc National du Cape Breton. Ce parc est
couvert en grande partie de foret boréale, ou taïga pour les camarades russes, mais on y trouve aussi une maison de retraite pour arbre, avec des feuillus de plus de 300 ans, les plus vieux du
Québec car, dans les zones accessibles, tout a déjà été coupé une fois ou a brûlé, parc nationaux y compris. Ce parc est très vallonné, et on a pu tester les freins du van. Verdict, ça fume quand
t'en abuse!
De belles balades sur le front de mer, des tourbières en profusion, de quoi réviser nos connaissances acquises, et les fleurs qui commencent enfin à pointer leur nez...par ce qu'il faut bien le
dire, tout en vert et brun, à un moment donné c'est un peu rébarbatif. Cela nous a quand même valu une belle rencontre avec une maman orignal et son petit, de tout près un soir au camping, et
probablement les 2 même le lendemain sur la route. Le petit avait cette fois dû prendre Cyrielle pour sa mère car en nous voyant, il s'est mis à courir tout droit sur nous.
Comme la plupart du temps le bois sur la plage ne manque pas, alors on ne se prive pas de faire des feux, mais aussi de confectionner un Molkky, jeu de quille finlandais que certains connaissent
déjà, et qui fera fureur au burning man (c'est fou ce qu'on peut faire avec 3x rien : un rien de bois, un rien de scie et un rien de sueur!)
Ce petit tour nous en apprend aussi beaucoup sur un pan oublié de l'histoire coloniale française, et probablement encore mieux cachée dans les livres d'histoire anglaise : la région de l'Acadie
et son peuple d'acadiens.
L'Acadie est un mot qui m'était familier, mais sans plus de vraie idée de ce que c'était. A part qu'une certaine Natasha Saint Pierre était Acadienne, j'avais pas retenu grand chose d'autre...
(je sais j'ai pas les meilleures références parfois)
Allez un petit topo historique, je suis sûre que vous adorez!
Le peuple qui s'est appelé et s'appelle encore "Acadien", ce sont en gros des Français surtout originaire de l'ouest de la France et qui ont été les premiers colons à s'installer sur ce continent
en 1603. Si d'autres colons, eux, préféraient les rives du fleuve Saint Laurent et commençaient à fonder Québec, les Acadiens ont peuplé la côte Est de l'Atlantique, entre ce qui est maintenant
le Maine aux USA et le Nouveau-Brunswick au Canada. Les Acadiens pour résumer, c'est un peu les hippies de l'ancien temps, ils faisaient leurs petites affaires de leur côté et s'en foutaient pas
mal que les Anglais et les Français se prennent la tête sur qui aura la plus grosse... part du territoire. Mais forcément, comme c'est bien connu que ça énerve tout le monde les gens trop
chevelus, les "méchants" Anglais sont venus gérer un peu toute cette joyeuse troupe de baba cool qui se la coulait douce. Ils avaient le choix entre prêter allégeance à la royauté anglaise
et donc devenir soldat pour tuer leurs anciens frères français, ou bien se faire virer de chez eux. Les Acadiens ont refusé et se sont donc vus déportés loin de leurs terres en 1755. On appelle
ça le grand dérangement, et en effet des 15 milles acadiens de l'époque, 10 à 12 milles vont être déportés, et on compte entre 7 à 9 milles morts... pas très glorieux tout ça. Depuis les Acadiens
sont un peu partout et nulle part, certains sont repartis en France, d'autres ont été envoyé en Louisiane, certains se sont échappés et se sont réfugiés un peu partout sur le territoire
québécois.
Mais leur culture et leur langue est restée, et du Nouveau-Brunswick à la Nouvelle-Ecosse, en Gaspésie et aux îles de la Madeleine, les Acadiens font partie de l'histoire et ils en sont
fiers.
Ceci est une cage à homard aux couleurs de l'Acadie
Une bonne cession de randonnées plus tard, nous quittons le Cape Breton pour se diriger vers l'île du prince Edouard puis les îles de la Madeleine. La première île est reliée au continent par un
pont de 13km au dessus du St Laurent. Nan nan c'est pas une faute de frappe, 13km c'est qu'une toute petite partie de sa largeur par endroit, car l'estuaire du St Laurent est le plus grand du
monde.
L'île du prince Edouard est un charmant petit endroit remplis de petites maisons proprettes avec des pelouses bien tondues, des petits buissons de fleurs roses bien taillées et de jolis arbres
bien droits... c'est le paradis des retraités anglais avec leur cottage et leur golf à moins de 500m de chez eux. Elle est aussi mondialement connu, surtout auprès du public féminin je pense,
grâce aux livres de "Anne et la maison aux pignons verts" (pour ceux qui connaissent pas du tout, c'est un peu un genre de Tom Sawyer féminin mais en beaucoup plus sage). Du coup c'est encore un
lieu de pèlerinage pour beaucoup de touristes en camping car tout équipé et à la chevelure bien grisonnante... Nous n'en avons pas vu beaucoup plus, car notre objectif principal c'était ça:
Lost dans le golf du St Laurent
Les îles de la Madeleine, situées à 5h de ferry du prince Edouard, sont rattachées administrativement à la province de Québec. C'est un regroupement de 6 îles habitées et quelques unes autour non
habitées. 5 des 6 sont francophones, mais même jusque la n'allait pas croire qu'un anglophone daignerai apprendre quelques mots de français, même s'ils sont que quelques familles coincés sur ce
petit ilot depuis toujours...question : "une bière s'il vous plait" réponse : "do you speak english"...mwarf! Quoi qu'il en soit on y a passé une très belle semaine à la force des mollets. Un bon
150km et le tour des îles était joué, avec un gommage de la face en prime, grâce aux terribles bourrasques de vents qui font voler le sable fin horizontalement. Un conseil, garder toujours la
bouche fermée!
Le maillot jaune est pas au tour de France!!
Les îles de la madeleine sont en fait chacune une sorte de grosse colonne de sel, recouverte de sédiments, qui sous la pression du plancher océanique n'a pas eu d'autre choix que de se redresser.
Le tout relié ensemble par des grandes dunes et lagunes qui font le bonheur d'une faune et flore atypique. Elles offrent de très beaux paysages et de superbes falaises, mais plus pour longtemps
car l'érosion de son sol très friable fait reculer ses côtes de plus de 5m par an par endroit, ce qu'il fait que dans 5000 ans environ, les îles seront redevenues sable...En attendant une foule
d'artisans et de gastronomes locaux font vivre son terroir, et on y retrouve le dernier fumoir à harengs encore en activité. Les 39 autres présents il y a un siècle on tous fermé faute à la
sur-pêche et paf, en 70 plus de poissons dans la mer...
Pêcheurs de homards, fromager, éleveur de sanglier et kitesurfeurs se côtoient dans un décor rustique qui risque de changer avec l'afflux des touristes en mal de vent du large, même si l'activité
économique en dépend depuis que la pêche ne fait plus recette. Ce n'est toute fois pas l'espace qui manque et les grandes plages de sable fin nous ont offert de bien bon spots de camping
sur la plage ensoleillée, coquillages et crustacés...
Un grand merci au passage à Sylvie et Gérard pour nous avoir offert le gîte et le couvert, et à nos 4 amis cyclistes américains, spécialistes de la lacto fermentation des cornichons (tout un
métier!), pour leur cocktail gin et miel ;)
De retour sur le continent le voyage continu direction la Gaspésie. Premier arrêt Percé et son rocher percé et l'île Bonaventure. C'est le rocher qu'on voit sur toutes les cartes postales et
pourtant c'est bien l'île qui vaut le détour. Un petit bateau nous y emmène, au passage nous en fait faire le tour, le temps de revoir plusieurs petits rorquals, des phoques, des pingouins
volants (et oui, pour la petite histoire encore, les pingouins ça vole, c'est les manchots qui ne volent pas), des oiseux en tout genre, dont et pas des moindres la plus grande colonie de fous de
bassan d'Amérique du Nord. Environ 50000 des ces oiseaux d'1m80 d'envergures nichent sur ses falaises et ses pentes escarpées...mais la encore l'avenir n'est pas tout rose, la colonie décline
depuis quelques années après 30 ans d'expansion car il semble qu'ils aient du mal à s'alimenter. 3 facteurs à cela : trop de phoques qui mangent trop de poissons, trop de pêche, mais
surtout de l'eau de surface trop chaude qui fait que le poisson reste au fond au frais et les oiseaux ne peuvent pas plonger jusque la...mais rien d'alarmant, la colonie est toujours bien
installée sur l'énorme couche de guano qu'elle s'est forgée au fil des ans ;)
si vous êtes un fou de bassan de - de 18ans, changez de page!
Une petite halte au Parc national de Forillon dans le brouillard, à la pointe nord de la Gasésie et point de départ d'un des chemins de randonné les plus longs Amérique du nord : la traversée des
Appalaches et son petit 5500km de long...avis aux amateurs ;). C'est probablement la qu'on a atteint le top de la forme physique, car sans trop s'en rendre compte on y a torché 10km de rando et
50km de vélo avant midi le premier jour! Au regret, la visibilité quasi-nul nous a obligé d'y abréger notre séjour, bien que c'est une très belle place pour les fans de randos sportives, ses
chemins sur les plus hauts monts du Québec dans le parc provincial de la Gaspésie (ne vous emballez pas, on parle ici de "collines" de 1300m tout au plus). Le route nous emmène le long des côtes,
aux pieds d'énormes falaises qui feraient par endroit passer Etretat pour un rebord de trottoir (bon j'exagère un peu d'accord :). Le soleil ne tarde pas à nous retrouver pour une dernière étape
au parc provincial du BIC. Rassurez vous, malgré le soleil il ne fait quand même pas chaud, et les canards Eiders (dont on utilise les plumes comme isolant) qui y nichent sont encore bien
rembourrés. Au passage un documentaire a été tourné à leur sujet, si vous le croisez je vous le conseille : Au grès de la plume arctique.
voila qui conclue ce nouvel épisode toujours à 200 à l'heure, le pays est si grand et le temps nous manque. Le 21 juin et la fête nationale du Québec approchant, on fil en profiter avec les
copains du cru, et conclure avec eux cette grande page qui touche maintenant à sa fin. On vous embrasse tous et à très bientôt.